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Comprendre le transistor MOSFET

Gros plan d'un transistor MOSFET de puissance TO-220 sur un fond noir.

Le transistor MOSFET, dont l’acronyme signifie Metal-Oxyde-Semiconductor Field-Effect Transistor (transistor à effet de champ métal-oxyde-semi-conducteur), est le composant le plus fondamental et le plus répandu de l’électronique moderne. Composant de base de tous les processeurs et circuits intégrés, il agit comme un interrupteur extrêmement miniaturisé et rapide, capable de contrôler le passage d’un courant électrique à l’aide d’une tension. Il appartient à la famille des transistors à effet de champ (FET) et est une évolution du JFET (Junction FET). Le terme transistor lui-même est une contraction de transfer resistor (résistance de transfert), illustrant parfaitement sa fonction de base : permettre le contrôle d’une résistance entre deux bornes par une troisième.

Le MOSFET est un composant de commutation de courant, c’est-à-dire qu’il peut être utilisé pour laisser passer plus ou moins d’électrons entre ses électrodes. Il peut être vu soit comme un interrupteur électronique, soit comme une résistance variable. Son fonctionnement est basé sur un effet de champ électrique, où l’application d’une tension à la grille crée un champ qui module la conductivité d’un canal de conduction, d’où le nom de la famille FET.

Rôle et comparaison avec le Transistor Bipolaire

Le transistor MOSFET est le pilier des circuits numériques et de l’électronique de puissance, tandis que le transistor à jonction bipolaire (BJT) a historiquement dominé l’amplification analogique. La distinction fondamentale entre les deux composants réside dans leur mode de contrôle, ce qui détermine la plupart de leurs caractéristiques et de leurs applications respectives.

Le BJT est un dispositif
contrôlé par le courant : un courant continu doit être appliqué à sa base pour réguler le courant plus important circulant entre le collecteur et l’émetteur. Cette exigence de courant de base constant a des conséquences importantes, notamment une consommation de puissance continue, même en régime stationnaire.

À l’inverse, le MOSFET est un composant contrôlé par la tension. Le courant qui passe de sa source à son drain est modulé par la tension appliquée à sa grille. La grille est isolée du reste du composant par une fine couche d’oxyde de silicium, ce qui fait que, en régime permanent, aucun courant ne circule dans la grille. Cette absence de courant d’entrée se traduit par une impédance d’entrée quasiment infinie pour le MOSFET, ce qui simplifie son interface avec d’autres circuits et le rend moins susceptible d’être perturbé par le bruit.

L’impédance d’entrée extrêmement élevée du MOSFET et l’absence de courant de grille en régime permanent sont à la base de sa supériorité en matière d’efficacité énergétique et de consommation de puissance. Contrairement au BJT qui dissipe de la puissance via son courant de base continu, le MOSFET ne consomme de l’énergie que lors de ses transitions de commutation, ce qui le rend idéal pour les appareils alimentés par batterie et les circuits intégrés modernes nécessitant une faible consommation. Cette caractéristique a joué un rôle déterminant dans l’essor de la miniaturisation et de l’électronique portative. En somme, bien que les deux transistors soient des composants d’amplification et de commutation, le MOSFET, par sa conception intrinsèque, est particulièrement bien adapté aux applications qui exigent une grande efficacité, une vitesse de commutation élevée et un faible bruit.

Structure et Principe de Fonctionnement

Anatomie du Composant

Un transistor MOSFET discret, se présente généralement avec trois broches, comme le BJT. Cependant, sa structure physique sous-jacente est un dispositif à quatre bornes. Ces bornes sont :
  • La source (S) : L’électrode par laquelle les porteurs de charge (électrons ou trous) entrent dans le canal de conduction.

  • Le drain (D) : L’électrode par laquelle les porteurs de charge sortent du canal.

  • La grille (G) : L’électrode de commande. Elle est isolée électriquement du canal par une couche de diélectrique (typiquement de l’oxyde de silicium) et c’est la tension qui lui est appliquée qui contrôle le courant entre la source et le drain.

  • Le substrat (B) : Aussi appelé le corps (Bulk), c’est le support physique dans lequel le transistor est fabriqué. Dans les circuits intégrés, les substrats de tous les transistors d’une même puce sont généralement connectés ensemble, souvent à la source ou au potentiel de masse, mais dans certains cas, il s’agit d’une borne de contrôle supplémentaire qui peut être polarisée.
La structure de base du MOSFET consiste en deux zones fortement dopées de la même polarité (la source et le drain) intégrées dans un substrat (le corps) de polarité inverse. L’espace entre ces deux zones définit la région du canal. La grille est un conducteur (historiquement du métal, mais maintenant souvent du silicium polycristallin dopé) qui se superpose au canal, séparée par une fine couche d’isolant (généralement du dioxyde de silicium, SiO2). Cette structure simple, mais ingénieuse, forme un condensateur entre la grille et le canal, d’où la nature de contrôle en tension du composant.

Types de MOSFETs

Les transistors MOSFET sont classés en fonction du dopage de leur canal et de leur mode de fonctionnement :

  • MOSFETs à canal N et à canal P : La distinction principale concerne les porteurs de charge qui transportent le courant. Dans un MOSFET à canal N, le courant est transporté par des électrons circulant dans un canal de type N, créé dans un substrat de type P. Les électrons sont les porteurs de charge majoritaires, et en raison de leur plus grande mobilité, les N-MOSFETs sont généralement plus rapides et plus efficaces que leurs homologues de type P. Inversement, dans un MOSFET à canal P, le courant est transporté par des trous qui se déplacent dans un canal de type P, créé dans un substrat de type N. Le sens de la tension de grille est inversé pour les P-MOSFETs. Les circuits logiques CMOS (complementary MOS) utilisent une combinaison de N-MOSFETs et de P-MOSFETs pour des raisons d’efficacité énergétique.

  • Modes à enrichissement et à appauvrissement : Le mode de fonctionnement le plus courant est le mode à enrichissement (enhancement mode). Dans ce mode, aucun canal de conduction n’existe par défaut entre la source et le drain lorsque la tension de grille est nulle. Il est nécessaire d’appliquer une tension de grille suffisante pour enrichir la région sous l’oxyde en porteurs de charge et former un canal. En revanche, un transistor en mode à appauvrissement (depletion mode) possède un canal préexistant, et il faut appliquer une tension de grille pour appauvrir la région en porteurs et interrompre le courant. L’étude se concentre principalement sur le mode à enrichissement en raison de sa prédominance dans les applications modernes.

Le Principe Physique (L’effet de Champ)

Le fonctionnement du MOSFET repose sur l’effet de champ, un phénomène de physique des semi-conducteurs. Pour un MOSFET à canal N en mode à enrichissement, le processus de formation du canal se déroule comme suit :

  1. Application de tension de grille : L’application d’une tension positive sur la grille (par rapport à la source) crée un champ électrique à travers la fine couche d’oxyde de silicium.

  2. Attraction et répulsion des charges : Ce champ électrique repousse les porteurs de charge majoritaires du substrat (les trous) loin de l’interface avec l’oxyde. Simultanément, il attire les porteurs de charge minoritaires (les électrons) des zones dopées N (la source et le drain) vers cette interface.

  3. Formation du canal : Si la tension de grille-source () est supérieure à une valeur critique appelée tension de seuil (), l’accumulation d’électrons est suffisante pour créer une couche d’inversion qui se comporte comme un canal de conduction de type N. Ce canal forme alors une connexion électrique entre la source et le drain, permettant au courant de circuler si une tension est appliquée.
La structure capacitive de la grille est l’élément clé qui permet ce contrôle en tension. C’est le champ électrique généré par la charge du condensateur grille-canal qui module la conductivité, et non un courant de commande comme dans le BJT. Ce mécanisme est à la fois la source de l’efficacité du MOSFET et la raison de la présence de capacitances parasites qui limiteront, comme on le verra plus loin, sa vitesse de commutation.

Les Régimes de Fonctionnement

Le comportement d’un transistor MOSFET dépend de la valeur relative des tensions appliquées à ses bornes, notamment la tension grille-source () et la tension drain-source (). Ces tensions définissent trois régions de fonctionnement principales qui confèrent au MOSFET sa polyvalence.

Région de Coupure

Dans cette région, le transistor est considéré comme éteint (OFF). Cela se produit lorsque la tension grille-source () est inférieure à la tension de seuil (). Sous cette condition, le champ électrique de la grille n’est pas assez fort pour créer un canal de conduction entre la source et le drain. Le transistor se comporte alors comme un circuit ouvert, bloquant la circulation du courant de drain (), qui est théoriquement nul. Ce mode de fonctionnement est utilisé pour représenter l’état 0 logique ou l’état d’un interrupteur ouvert dans les circuits numériques.

Région Linéaire

Ce mode de fonctionnement se produit lorsque la tension est supérieure à et que la tension est faible. Le canal de conduction est créé, et sa résistance est contrôlée par la tension . Plus est élevée, plus le canal est large et plus sa résistance est faible. Dans cette région, la relation entre le courant de drain () et la tension suit la loi d’Ohm, ce qui confère au MOSFET le comportement d’une résistance variable. Une valeur de résistance faible et fixe peut être obtenue en saturant la tension de grille, c’est-à-dire en l’amenant à sa valeur maximale pour la mise en conduction. Ce mode est utilisé pour les applications d’interrupteur électronique, où le but est d’atteindre une résistance à l’état passant () la plus faible possible, mais également dans les gradateurs de lumière ou les commandes de volume, où un contrôle fluide du courant est requis.

Région de Saturation

La région de saturation se produit lorsque est supérieure à et que est suffisamment élevée, plus précisément lorsque . Dans ces conditions, le canal de conduction s’étrangle (pinch-off) à l’approche du drain. Le courant de drain () devient alors quasiment indépendant de et est uniquement contrôlé par la tension . Le MOSFET se comporte comme une source de courant commandée en tension. C’est ce mode de fonctionnement qui est utilisé pour les applications d’amplification de signal, où une variation de la tension de grille se traduit par une variation proportionnelle (et amplifiée) du courant de drain.

Les Courbes Caractéristiques

La compréhension des régimes de fonctionnement est facilitée par l’analyse des courbes caractéristiques du MOSFET :

  • Courbe de transfert ( vs ) : Cette courbe montre la relation entre le courant de drain ( et la tension de grille-source () pour une tension constante. Elle permet de déterminer graphiquement la tension de seuil (), car le courant commence à circuler uniquement lorsque dépasse cette valeur.

  • Courbes de sortie ( vs ) : Ce sont des familles de courbes qui tracent le courant de drain en fonction de la tension drain-source pour différentes valeurs de . Ces courbes illustrent clairement les trois régions de fonctionnement : la région linéaire, où la pente est non nulle, la région de saturation, où le courant devient horizontal (constant), et la région de coupure, où le courant est nul.

Régime Conditions de Tension Comportement Application Typique
Coupure Vgs< Vth Interrupteur ouvert, pas de courant () État logique OFF, commutation
Linéaire et Résistance variable contrôlée par Commutation (faible ), variateurs
Saturation et Source de courant contrôlée par Amplification de signal, sources de courant
Un point de confusion majeur pour les ingénieurs est la terminologie des régions de fonctionnement. Alors que la terminologie standard pour les MOSFETs nomme la région de courant constant saturation (où la tension est élevée), le même terme saturation pour les BJTs décrit un état d’interrupteur fermé avec une tension collecteur-émetteur très faible, soit le comportement du MOSFET en mode ohmique. De plus, certains fabricants et documents d’application pour les MOSFETs de puissance utilisent le terme mode linéaire pour décrire la région de saturation où le courant est constant, et région ohmique pour ce que l’on appelle habituellement la région linéaire. Cette divergence terminologique, bien que techniquement liée à des contextes d’application différents (amplification vs puissance), nécessite une attention particulière pour éviter toute confusion dans l’étude et la conception de circuits.

Paramètres Électriques et Propriétés Avancées

Les performances d’un transistor MOSFET sont définies par plusieurs paramètres clés qui découlent de sa conception physique et qui sont critiques pour sa sélection et son utilisation dans un circuit.

Paramètres Essentiels

  • Tension de seuil () : C’est la tension minimale que la grille doit dépasser par rapport à la source pour que le canal de conduction se forme et que le transistor commence à conduire un courant significatif. La tension de seuil est une caractéristique inhérente au processus de fabrication du composant. Pour un N-MOSFET à enrichissement, est une tension positive.

  • Résistance à l’état passant () : Lorsque le MOSFET est complètement allumé et opère dans sa région ohmique, il se comporte comme une résistance linéaire avec une valeur très faible. Cette résistance est appelée (résistance drain-source à l’état passant). Une valeur de Rds_on faible est cruciale, en particulier dans les applications de commutation de puissance, car elle minimise les pertes d’énergie dissipées sous forme de chaleur, qui sont proportionnelles au carré du courant ().

  • Transconductance () : La transconductance est un paramètre fondamental qui mesure l’efficacité avec laquelle la tension d’entrée de la grille contrôle le courant de sortie du drain. Elle est définie comme le rapport de la variation du courant de drain () à la variation correspondante de la tension grille-source () pour une tension drain-source constante. Mathématiquement, . La transconductance est d’une importance capitale dans les applications d’amplification, car elle détermine le gain en tension du circuit (, où est la résistance de drain).

Effets Non-idéaux

La simplicité du modèle de base du MOSFET cache des phénomènes physiques complexes qui deviennent critiques dans la conception de circuits avancés, notamment ceux qui opèrent à haute fréquence ou dans des systèmes à grande échelle.

  • L’Effet de corps (body effect) : Le MOSFET est un dispositif à quatre bornes : grille, drain, source et substrat (bulk). Bien que le substrat soit souvent relié à la source (rendant le dispositif à trois bornes), il ne l’est pas toujours, en particulier dans les circuits intégrés complexes. Lorsque la tension source-substrat () n’est pas nulle, un phénomène appelé l’effet de corps se produit. Cette tension augmente la tension de seuil () du transistor, nécessitant une tension de grille plus élevée pour activer le canal. Cet effet complique la conception de circuits logiques et analogiques en rendant la tension de seuil dépendante du point de fonctionnement du transistor, ce qui doit être pris en compte pour assurer une performance prévisible.

  • Capacités parasites : La structure physique du MOSFET engendre inévitablement des capacités parasites entre ses bornes. Les trois capacitances les plus importantes sont la capacité grille-source (), la capacité grille-drain () et la capacité drain-source (). La capacité grille-drain, en particulier, est un facteur limitant majeur dans les applications de commutation rapide et d’amplification à haute fréquence en raison de l’effet Miller. Ces capacitances doivent être chargées et déchargées à chaque cycle de commutation, ce qui ralentit la vitesse de transition du transistor et entraîne des pertes de puissance dynamiques proportionnelles à la fréquence de commutation et à la tension de commutation (). La présence de ces capacités est une conséquence directe de la conception du transistor à effet de champ à grille isolée, et leur minimisation est un objectif constant de l’ingénierie des semi-conducteurs.

Applications Pratiques et Cas d’Étude

La polyvalence du MOSFET lui permet d’être utilisé dans une vaste gamme d’applications, qu’il s’agisse de traiter des signaux numériques ou d’alimenter des charges de puissance.

Le MOSFET en tant qu’Interrupteur Électronique

Le rôle le plus courant du MOSFET est celui d’un interrupteur. En basculant entre le régime de coupure (interrupteur ouvert) et le régime ohmique (interrupteur fermé) sous l’effet de la tension de grille, il permet de contrôler efficacement des charges. Cette capacité est à la base de :
  • Les circuits logiques numériques : Les portes logiques sont construites en utilisant des paires de transistors N-MOSFET et P-MOSFET dans une configuration appelée CMOS (complementary MOS). L’avantage principal de la logique CMOS est sa consommation de puissance statique quasiment nulle, car un des transistors est toujours en coupure pendant que l’autre est en conduction, créant un chemin de courant direct uniquement pendant la transition.

  • Les alimentations à découpage (switching power supplies) : Le MOSFET est utilisé pour commuter rapidement le courant d’une alimentation afin de générer une tension de sortie régulée. Sa vitesse de commutation et sa faible résistance à l’état passant sont essentielles pour minimiser les pertes.

  • La commande de moteurs à courant continu : Un signal de modulation de largeur d’impulsion (MLI) appliqué à la grille permet de contrôler la vitesse d’un moteur en variant la durée des impulsions de tension, un processus rendu très efficace par la faible dissipation de puissance du MOSFET à l’état passant.

Le MOSFET en tant qu’Amplificateur de Signal

Pour agir comme un amplificateur, le MOSFET doit être polarisé, c’est-à-dire que ses tensions de fonctionnement doivent être fixées à un point de repos (appelé point Q) dans la région de saturation. Dans ce régime, le MOSFET agit comme une source de courant commandée en tension. En superposant un petit signal alternatif sur la tension de grille continue, la variation de la tension de grille est convertie en une variation amplifiée du courant de drain, qui est ensuite convertie en une variation de tension à la sortie. Ce mode est utilisé dans des applications telles que :
  • Les amplificateurs audio : Le MOSFET peut être utilisé pour amplifier des signaux audio avec une grande fidélité, grâce à sa capacité à maintenir une amplification linéaire.

  • Les amplificateurs de signaux RF (radiofréquence) : Sa haute vitesse de commutation et sa capacité à fonctionner à des fréquences élevées le rendent adapté à l’amplification de signaux dans les communications sans fil.

Avantages et Inconvénients

Le choix entre un MOSFET et un BJT dans une application de conception dépend de compromis entre leurs caractéristiques intrinsèques. Le tableau suivant résume les différences clés.

 

Caractéristiques BJT MOSFET
Type de contrôle Contrôlé par le courant (de la base) Contrôlé par la tension (de la grille)
Impédance d’entrée Faible Très élevée
Consommation de puissance Moins efficace en raison du courant de base constant Très efficace en raison du courant de grille nul en régime permanent
Vitesse de commutation Plus lente en raison des effets de stockage de charge dans la base Haute vitesse, idéal pour les circuits haute fréquence
Gain Gain en courant plus élevé Gain en courant plus faible, gain en tension élevé
Robustesse Peut supporter des courants élevés Efficace dans les circuits à faible puissance, mais des MOSFETs de puissance existent pour des applications spécifiques
Immunité au bruit Moins immunisé en raison d’une faible impédance d’entrée Très immunisé en raison d’une impédance d’entrée élevée
Manipulation Facile à utiliser Nécessite une manipulation plus prudente (sensibilité à l’électricité statique)
Applications typiques Amplificateurs audio, circuits de signaux faibles Circuits numériques (CMOS), électronique de puissance, circuits intégrés

L’Évolution des MOSFETs

Le besoin de nouvelles technologies

Le silicium (Si), le matériau de base des transistors depuis des décennies, a atteint ses limites physiques pour les applications de puissance et de haute fréquence. Ces limites concernent notamment la tension de claquage (la tension maximale que le matériau peut supporter), la conductivité thermique et la résistance à l’état passant. L’électrification croissante des transports, le développement des centres de données et la demande pour des chargeurs plus rapides ont nécessité des composants capables de gérer des tensions, des courants et des fréquences de commutation plus élevés avec des pertes minimales.

Le Carbure de Silicium (SiC) et le Nitrure de Gallium (GaN)

Pour surmonter les limitations du silicium, l’industrie s’est tournée vers les semi-conducteurs à large bande interdite (Wide Band Gap, WBG), notamment le Carbure de Silicium (SiC) et le Nitrure de Gallium (GaN). Ces matériaux possèdent des propriétés physiques nettement supérieures à celles du silicium :
  • Bande interdite large : L’énergie nécessaire pour qu’un électron passe de la bande de valence à la bande de conduction est beaucoup plus élevée pour le SiC et le GaN que pour le Si. Cela se traduit par une tension de claquage beaucoup plus élevée et la capacité à fonctionner à des températures plus élevées.

  • Haute mobilité des électrons et vitesse de saturation : La vitesse à laquelle les porteurs de charge peuvent se déplacer dans le matériau est un facteur clé pour la vitesse de commutation. Le GaN, en particulier, possède une mobilité des électrons extrêmement élevée, ce qui lui confère une vitesse de commutation bien supérieure à celle du SiC et du silicium.

  • Haute conductivité thermique : Le SiC a une conductivité thermique plus de trois fois supérieure à celle du silicium, ce qui lui permet de dissiper la chaleur plus efficacement et de fonctionner avec des boîtiers plus petits.

Avantages Techniques et Applications

La comparaison entre le GaN et le SiC montre que ces deux technologies ne se concurrencent pas directement, mais se complètent dans des niches d’application spécifiques en fonction des compromis souhaités :

  • GaN : Les transistors GaN excellent dans les applications qui exigent des fréquences de commutation extrêmement élevées, typiquement supérieures à 1 MHz. Sa faible charge de grille et ses pertes de commutation réduites de plus de 50 % par rapport au SiC en font le choix idéal pour les applications à haute densité de puissance et à faible énergie, comme les chargeurs rapides, les alimentations de serveurs et les télécommunications.

  • SiC : Les MOSFETs en SiC dominent les applications de haute puissance et de haute tension (> 1 kW, > 1200 V). Leur robustesse, leur capacité à supporter des tensions élevées et leur excellente conductivité thermique les rendent indispensables pour les onduleurs de véhicules électriques (VE), les stations de recharge rapide, et les systèmes industriels de gestion de l’énergie.

Propriété Silicium (Si) Carbure de Silicium (SiC) Nitrure de Gallium (GaN)
Bande Interdite 1.12 eV 3.26 eV 3.4 eV
Vitesse de Saturation Modérée Élevée Très élevée
Conductivité Thermique Modérée Excellente Bonne
Mobilité des Porteurs Modérée Élevée Très élevée
Applications Typiques Circuits logiques, faible puissance, amplificateurs Onduleurs de VE, systèmes ferroviaires, convertisseurs haute puissance Chargeurs rapides, télécommunications, convertisseurs haute fréquence
Coût de Fabrication Faible (technologie mature) Élevé (matériaux et procédés spécialisés) Plus faible que le SiC (croissance sur substrats Si)

La Zone d’Opération Sécurisée

Pour les transistors de puissance, un concept de conception essentiel est la zone d’opération sécurisée (Safe Operating Area, SOA). Le SOA est un graphique qui définit la plage de combinaisons de courant () et de tension () dans laquelle un transistor peut fonctionner sans risque d’auto-destruction. Les limites de cette zone sont définies par des contraintes physiques, notamment le courant maximal, la tension maximale, la dissipation de puissance maximale et la température de jonction maximale. En particulier, les fabricants de MOSFETs de puissance fournissent des courbes de SOA pour différents scénarios, comme des impulsions de courte durée, car la capacité du composant à dissiper la chaleur est le facteur le plus critique. Le respect de cette zone est impératif pour éviter la fuite thermique (thermal runaway), un phénomène où un point chaud sur la puce attire plus de courant, ce qui augmente la température, ce qui attire encore plus de courant, entraînant une destruction rapide du composant. L’évaluation du SOA est un critère de conception fondamental dans toutes les applications de puissance où le MOSFET opère en dehors de sa simple fonction d’interrupteur.

Conclusion et Perspectives

Le transistor MOSFET est un chef-d’œuvre d’ingénierie qui a transformé l’électronique. Sa conception simple mais géniale, basée sur le principe de l’effet de champ et du contrôle en tension, a permis une miniaturisation sans précédent, une efficacité énergétique et une vitesse de commutation qui ont rendu possibles les circuits intégrés et les appareils portables modernes. Sa capacité à agir à la fois comme un interrupteur parfait pour la logique numérique et comme un amplificateur linéaire pour les signaux analogiques démontre sa polyvalence inégalée.

Cependant, les limites physiques du silicium dans les applications de haute puissance ont ouvert la voie à la prochaine révolution : les MOSFETs en carbure de silicium et en nitrure de gallium. Ces matériaux à large bande interdite repoussent les frontières des performances, de la densité de puissance et de l’efficacité, permettant des systèmes plus compacts et plus puissants. Alors que le GaN se positionne comme le champion de la haute fréquence et de la haute efficacité pour les applications de consommation, le SiC s’impose comme la référence pour la robustesse et la puissance dans le secteur automobile et industriel.

L’évolution du transistor MOSFET est loin d’être terminée. Les recherches se poursuivent pour minimiser les effets non-idéaux tels que les capacitances parasites et pour optimiser les modèles de circuit. À mesure que les dispositifs en SiC et GaN deviennent plus abordables et plus matures, ils ne se contentent pas de remplacer les anciens composants en silicium, ils créent de nouvelles opportunités de conception, marquant une nouvelle ère pour l’électronique de puissance. Comprendre le MOSFET et ses évolutions est essentiel pour quiconque souhaite maîtriser l’électronique contemporaine.

Articles complémentaires :

  1. Comprendre les composants actifs
  2. Les transistors en électronique
  3. Comprendre le transistor bipolaire