Résistances en électronique

La résistance électrique, souvent symbolisée par la lettre R, est une propriété fondamentale des matériaux qui s’oppose au passage du courant électrique. Il s’agit d’un composant électrique passif à deux bornes, conçu pour implémenter une résistance spécifique au sein d’un circuit. L’unité de mesure de la résistance est l’ohm, dont le symbole est la lettre grecque oméga ().
Sur le plan physique, la résistance est le résultat des collisions entre les électrons libres, qui se déplacent dans le matériau sous l’effet d’une tension, et les ions fixes qui composent la structure cristalline de ce matériau. Ces collisions entravent le flux ordonné des électrons, limitant ainsi l’intensité du courant qui peut traverser le composant. Cette opposition au mouvement des charges électriques est la définition même de la résistance.
Rôle et Fonction d’une Résistance
Le rôle principal d’une résistance dans un circuit est de limiter le courant circulant dans un composant ou une portion de circuit. Une analogie couramment utilisée pour illustrer ce concept est celle d’un robinet qui contrôle le débit d’eau dans un tuyau. En ajustant la valeur de la résistance, il est possible de garantir que le courant ne dépasse pas une limite sécuritaire pour les autres composants sensibles du circuit.
Au-delà de cette fonction de base, les résistances remplissent plusieurs rôles cruciaux dans la conception de circuits électroniques. Elles sont utilisées pour diviser des tensions, ajuster des niveaux de signal, et fournir une polarisation aux dispositifs actifs. Un aspect de leur fonction qui mérite une attention particulière est leur rôle en tant que capteurs. En effet, les résistances peuvent être conçues de manière à ce que leur valeur ne soit pas fixe, mais dépende de facteurs externes.
Cette dépendance transforme la résistance d’un simple régulateur de courant en un transducteur capable de convertir une grandeur physique en un signal électrique. Par exemple, les thermistances (NTC et PTC) sont des résistances dont la valeur varie en fonction de la température ambiante. De même, les photorésistances (LDR) voient leur valeur ohmique diminuer lorsque la luminosité augmente. Elles peuvent alors être intégrées dans un pont diviseur de tension pour que la tension de sortie, mesurée par un microcontrôleur comme un Arduino, soit une représentation de la luminosité ambiante. Ce rôle de capteur est fondamental dans de nombreuses applications, comme les systèmes d’éclairage public automatique ou les appareils photographiques.
Résistance et Effet Joule
Lorsqu’un courant électrique traverse une résistance, une partie de l’énergie électrique est convertie en chaleur. Ce phénomène est connu sous le nom d’effet Joule. La puissance dissipée par cet effet est un facteur critique dans la conception de circuits, car elle peut entraîner une surchauffe et la destruction des composants si elle n’est pas correctement gérée. La puissance électrique, notée P, est la puissance de fonctionnement prévue par le fabricant et est mesurée en watts (W).
Les Lois et Calculs Essentiels
La Loi d’Ohm
La loi d’Ohm est l’une des relations les plus fondamentales en électronique. Elle établit le lien direct entre la tension (U), le courant (I) et la résistance (R) dans un circuit. Elle se formule comme suit : U=R×I où U est la tension aux bornes de la résistance en volts (U), R est la résistance en ohms (), et I est l’intensité du courant en ampères (A).
Cette relation linéaire implique que si la résistance reste constante, toute augmentation du courant entraîne une augmentation proportionnelle de la tension, et inversement. La loi d’Ohm peut être réorganisée pour calculer n’importe laquelle de ces trois variables si les deux autres sont connues.
Les Formules de Puissance
La puissance (P) dissipée par une résistance peut être calculée en utilisant la formule de base , où U est la tension et I est le courant. En combinant cette formule avec la loi d’Ohm, il est possible de dériver deux autres expressions essentielles pour la puissance dissipée :
- En substituant la tension U par dans la formule de base, on obtient :
- De la même manière, en substituant le courant I par , on obtient :
Ces formules sont indispensables pour s’assurer que la puissance dissipée par une résistance ne dépasse pas sa puissance nominale, c’est-à-dire la puissance maximale que le composant peut dissiper de manière continue sans risquer d’être endommagé. Il est recommandé de choisir une résistance dont la puissance nominale est au moins deux fois supérieure à la puissance dissipée calculée.
Association de Résistances
Groupement en Série
Lorsque des résistances sont connectées en série, elles sont placées bout à bout sur un même chemin, de sorte que le même courant circule à travers chacune d’elles. Dans ce type de montage, la résistance équivalente () de l’ensemble est simplement la somme de leurs résistances individuelles : Req=R1+R2+⋯+Rn.
Groupement en Parallèle
Dans un groupement en parallèle, les résistances sont connectées de telle sorte que la même tension est appliquée à chacune d’elles. Le courant total se divise alors entre les différentes branches. La résistance équivalente se calcule en prenant l’inverse de la somme des inverses de chaque résistance : (1/
Pour le cas particulier de deux résistances en parallèle, la formule peut être simplifiée en : .
Cas des Groupements Mixtes
Pour les circuits qui combinent des connexions en série et en parallèle, la résistance équivalente totale peut être déterminée en calculant d’abord la résistance de chaque sous-section séparément, avant de combiner ces résultats. Cette méthode de réduction progressive du circuit est essentielle pour simplifier l’analyse et les calculs.
Typologie des Résistances
Résistances à Valeur Fixe (Traversantes)
Pour les résistances traversantes, la valeur ohmique, la tolérance et parfois le coefficient de température sont indiqués par un code de bandes de couleur. Ce système de codage utilise une série de 4, 5 ou 6 anneaux peints sur le corps du composant. Les premiers anneaux représentent les chiffres significatifs de la valeur, le troisième ou quatrième anneau est le multiplicateur, et le dernier anneau (souvent séparé) indique la tolérance. Pour les résistances de haute précision, un anneau supplémentaire peut indiquer le coefficient de température.
Couleur | Chiffre | Multiplicateur | Tolérance |
---|---|---|---|
Noir | 0 | x1 | / |
Marron | 1 | x10 | ± 1% |
Rouge | 2 | x100 | ± 2% |
Orange | 3 | x1 kΩ | / |
Jaune | 4 | x10 kΩ | / |
Vert | 5 | x100 kΩ | ± 0.5% |
Bleu | 6 | x1 MΩ | ± 0.25% |
Violet | 7 | x10 MΩ | ± 0.1% |
Gris | 8 | x100 MΩ | ± 0.05% |
Blanc | 9 | x1 GΩ | / |
Or | 10 | x0.1 Ω | ± 5% |
Argent | 11 | x0.01 Ω | ± 10% |
Pour déterminer la valeur d’une résistance, il faut lire les chiffres significatifs, les combiner en un nombre, et le multiplier par la valeur du multiplicateur. La tolérance indique la plage de valeurs réelles possibles pour la résistance. Par exemple, une résistance avec les bandes rouge-rouge-marron-or a une valeur de . Avec une tolérance de (bande or), sa valeur réelle se situe entre et .
Les Résistances Variables
Contrairement aux résistances fixes, les résistances variables sont des composants dont la valeur peut être ajustée. On distingue deux catégories principales.
-
Les potentiomètres et rhéostats : Ce sont des résistances dont la valeur peut être modifiée manuellement, souvent à l’aide d’une vis ou d’un bouton rotatif. Ils sont couramment utilisés dans des applications telles que les contrôles de volume ou les réglages de luminosité.
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Les résistances dépendantes de l’environnement : Ces composants agissent comme des capteurs, leur valeur de résistance variant en fonction d’un paramètre physique externe.
-
Thermistances (NTC et PTC) : Leur résistance est sensible à la température. Une thermistance NTC (Negative Temperature Coefficient) voit sa résistance diminuer lorsque la température augmente, tandis qu’une thermistance PTC (Positive Temperature Coefficient) voit sa résistance augmenter avec la température.
-
Photorésistances (LDR) : La valeur de leur résistance est fonction de l’intensité lumineuse. Plus la lumière est forte, plus la résistance diminue. Elles sont utilisées pour des applications de détection de lumière, comme l’allumage automatique de l’éclairage public. Elles sont particulièrement sensibles à la chaleur, qui peut altérer leur valeur ohmique.
-
Varistances (VDR) : La résistance des varistances (Voltage-Dependent Resistor) diminue brusquement lorsque la tension à leurs bornes augmente. Elles sont utilisées pour protéger les circuits contre les surtensions, agissant comme des fusibles ou des éléments de décharge.
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Les Résistances CMS
Avantages et Inconvénients des CMS
Les résistances CMS (Composants Montés en Surface), également appelées résistances SMD (Surface Mount Devices), sont des composants électroniques rectangulaires de très petite taille. Elles ont largement remplacé les résistances traversantes dans de nombreuses applications industrielles et grand public en raison de leurs avantages significatifs.
Leur principal avantage est la miniaturisation. Leur petite taille permet de concevoir des circuits imprimés (PCB) beaucoup plus compacts et plus denses, ce qui est essentiel pour les appareils électroniques modernes comme les smartphones et les tablettes. La production de ces composants est également hautement automatisée, ce qui permet de fabriquer des centaines de milliers de composants par heure, réduisant ainsi les coûts pour la production en série. De plus, leur faible impédance les rend idéales pour les circuits haute fréquence.
Cependant, la miniaturisation présente une contrepartie directe. En raison de leur petite taille et de leur surface réduite, les résistances CMS ne peuvent pas dissiper de grandes quantités de chaleur et ne conviennent donc pas aux circuits à haute puissance. Ce compromis entre le gain de place et la capacité de gestion thermique est un défi de conception central pour les ingénieurs. En outre, leur petite taille les rend difficiles à manipuler manuellement pour les réparations ou le prototypage, nécessitant souvent l’utilisation de grossissements ou d’équipements robotisés.
Les Systèmes de Codage des Résistances CMS
Étant donné leur taille, les résistances CMS ne peuvent pas utiliser le code couleur. Leur valeur est indiquée par des codes alphanumériques imprimés sur leur corps. Il existe trois principaux systèmes de codage en fonction de la précision du composant :
-
Codage à 3 chiffres : Ce système est utilisé pour les résistances avec une tolérance standard de . Les deux premiers chiffres représentent les chiffres significatifs de la valeur, et le troisième est le multiplicateur (puissance de 10). Par exemple, le code 683 signifie . La lettre R est utilisée pour indiquer la position d’une virgule décimale pour les valeurs inférieures à (par exemple, 4R7 représente ).
-
Codage à 4 chiffres : Ce système est utilisé pour les résistances de plus grande précision. Les trois premiers chiffres représentent les chiffres significatifs, et le quatrième est le multiplicateur. Par exemple, le code 7920 signifie . L’utilisation de R est également possible pour les valeurs non entières.
-
Codage de précision EIA-96 : Ce code est spécifiquement utilisé pour les résistances de précision avec une tolérance de . Il se compose de trois caractères : deux chiffres qui correspondent à une valeur de résistance spécifique et une lettre qui agit comme un multiplicateur. Le déchiffrage de ce code nécessite une table de correspondance prédéfinie pour les valeurs numériques et les multiplicateurs.
Code | Valeur | Lettre | Multiplicateur |
---|---|---|---|
01 | 100 | A | x10(⁰) |
02 | 102 | B | x10(¹) |
03 | 105 | C | x10(²) |
… | … | D | x10(³) |
29 | 196 | E | x10(⁴) |
… | … | F | x10(⁵) |
96 | 100 | G | x10(⁻²) |
Applications Fondamentales
La Limitation de Courant
La fonction de limitation de courant est vitale pour la protection de composants sensibles, comme les diodes électroluminescentes (LED). Les LED ont tendance à griller si un courant excessif les traverse, car elles ne peuvent supporter qu’un courant limité et constant. Une résistance placée en série avec la LED agit comme un régulateur, empêchant le courant de monter trop haut et évitant ainsi les pics qui pourraient endommager le composant.
La valeur de la résistance de limitation de courant se calcule à l’aide de la formule suivante : où est la tension de la source, est la tension de seuil de la LED, et est le courant désiré pour la LED. Pour des LED en série, la chute de tension totale est la somme des chutes de tension de chaque LED.
Le Diviseur de Tension
Le diviseur de tension est un montage électronique simple composé de deux résistances en série. Il permet de produire une tension de sortie plus basse à partir d’une tension d’entrée. La tension de sortie () est mesurée aux bornes de la deuxième résistance (). La formule qui régit ce montage est la suivante : Ce montage est couramment utilisé pour créer des tensions de référence ou pour abaisser des tensions continues dans des circuits.
Les Résistances dans les Circuits de Filtrage
Le Rôle des Résistances, Condensateurs et Inductances
Les résistances, condensateurs et inductances sont tous des composants passifs, mais ils gèrent l’énergie électrique de manière fondamentalement différente. Une résistance dissipe l’énergie sous forme de chaleur et oppose la même résistance au courant alternatif et au courant continu.
À l’inverse, les condensateurs et les inductances stockent l’énergie. Un condensateur stocke l’énergie dans un champ électrique et a pour particularité de bloquer le courant continu tout en laissant passer le courant alternatif. Une inductance, quant à elle, stocke l’énergie dans un champ magnétique et agit de manière opposée : elle laisse passer le courant continu (se comportant comme un court-circuit) tout en s’opposant au courant alternatif.
Cette opposition sélective au courant en fonction de sa fréquence (le courant continu étant une fréquence nulle) est le principe de base du filtrage. En combinant judicieusement ces composants, il est possible de créer des circuits qui ne laissent passer que les signaux de certaines plages de fréquence.
Explication des Filtres Passe-Bas et Passe-Haut
Les filtres passifs sont des circuits qui utilisent des combinaisons de résistances, de condensateurs et/ou d’inductances pour laisser passer des fréquences spécifiques tout en atténuant les autres.
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Filtre passe-bas (Low-Pass Filter, LPF) : Ce filtre permet aux basses fréquences de passer, tout en bloquant les fréquences supérieures. Il est utile pour éliminer les interférences haute fréquence ou le bruit dans les signaux audio. Un filtre passe-bas RC est un montage simple composé d’une résistance et d’un condensateur en série.
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Filtre passe-haut (High-Pass Filter, HPF) : À l’opposé, ce filtre bloque les basses fréquences et laisse passer les hautes fréquences. Les filtres passe-haut sont souvent utilisés pour séparer les signaux audio graves et aigus dans les systèmes hi-fi ou pour bloquer la composante continue dans certains circuits d’alimentation.
La performance d’un filtre est caractérisée par sa fréquence de coupure (), qui est le point où le signal est atténué de -3 dB (environ 70,7 % de sa puissance). La formule pour un filtre RC est : fc=1/2πRC.
Conseils Pratiques
L’Impact de la Tolérance sur la Performance
La tolérance d’une résistance est une mesure de l’erreur, exprimée en pourcentage, entre sa valeur de résistance réelle et sa valeur nominale. Bien que cela puisse sembler un détail mineur, la tolérance peut avoir des conséquences significatives sur la performance d’un circuit, en particulier dans les applications de précision.
Par exemple, considérons un diviseur de tension conçu pour produire une tension de sortie de 2,5 V en utilisant deux résistances de . Si l’une des résistances a une tolérance de (sa valeur est de ) et l’autre une tolérance de (sa valeur est de ), la tension de sortie réelle sera d’environ 2,37 V. Cela représente une erreur de 5,2 % par rapport à la valeur nominale.
Cet exemple montre que la tolérance n’est pas seulement un écart aléatoire, mais un facteur de conception critique qui peut compromettre la précision du signal. Dans des applications à enjeux élevés, comme les équipements médicaux, l’utilisation de résistances de précision avec des tolérances plus serrées ( ou mieux) est indispensable pour garantir la fiabilité et l’exactitude des résultats. Les concepteurs doivent évaluer le compromis entre le coût des composants à faible tolérance et la performance requise du circuit.
Le Choix de la Puissance Nominale
La puissance nominale d’une résistance est la puissance maximale qu’elle peut dissiper en chaleur de manière continue sans être endommagée. Le choix de cette valeur est crucial pour la fiabilité et la sécurité d’un circuit. Il est impératif de s’assurer que la puissance dissipée par la résistance (calculée avec les formules de puissance) est bien inférieure à sa puissance nominale. Une règle de conception couramment adoptée est de choisir une puissance nominale au moins deux fois supérieure à la puissance dissipée dans le circuit. Ce facteur de sécurité garantit que la résistance peut fonctionner de manière stable même dans des conditions de charge thermique élevées, évitant ainsi la surchauffe et la défaillance prématurée.
Synthèse des Rôles des Composants Passifs
En conclusion, la résistance est un composant passif indispensable à l’électronique moderne. Son rôle principal est de s’opposer au courant et de dissiper l’énergie sous forme de chaleur. Toutefois, son rôle ne se limite pas à cela. Elle peut également agir comme un capteur ou un élément de régulation de signal.
Sa fonction se distingue fondamentalement des deux autres composants passifs majeurs : le condensateur et l’inductance. Le condensateur stocke l’énergie dans un champ électrique et bloque le courant continu, tandis que l’inductance stocke l’énergie dans un champ magnétique et bloque le courant alternatif. C’est la combinaison de ces comportements complémentaires et de la fonction de dissipation de la résistance qui permet de concevoir des circuits sophistiqués tels que les filtres, les diviseurs de tension et les circuits de protection. Comprendre le rôle unique et les limitations de chaque composant passif est la clé d’une conception électronique efficace et fiable.
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